Morsures et piq�res d�animaux en Europe
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Morsures et piq�res d�animaux en Europe

 Dans les pays d'Europe, l'incidence des piq�res et des morsures d'animaux venimeux est faible compar�e � ce qu'elle est dans les r�gions tropicales. L'envenimation est cependant un probl�me de sant�: 0,3% � 3% des consultations adress�es aux centres antipoisons europ�ens sont dues � des piq�res et des morsures, et un nombre d'incidents encore plus grand ne sont ni signal�s ni enregistr�s (piq�res d'abeilles, par exemple). Des esp�ces import�es non autochtones, adopt�es par des amateurs d'animaux exotiques,
sont � l'origine de probl�mes m�dicaux plus complexes et d'envenimations difficiles � diagnostiquer et � traiter. Il est par cons�quent important que les cliniciens et les responsables de l'information des centres antipoisons connaissent le diagnostic et la prise en charge des envenimations dues aux animaux indig�nes
aussi bien qu'aux "animaux import�s". Cet article propose une revue des caract�ristiques essentielles et des progr�s r�cents concernant le diagnostic et la prise en charge des piq�res et des morsures d'animaux terrestres et aquatiques.


Animaux terrestres:

  Reptiles:

Vip�res. Les serpents sont les animaux venimeux les plus redout�s dans le monde entier. Cette crainte est justifi�e en raison de la morbidit� et de la mortalit� tr�s �lev�es dans certaines r�gions du monde (1 000 d�c�s par an en Malaisie). Fort heureusement, les morsures de serpent sont moins fr�quentes et moins dangereuses dans les pays europ�ens, o� les morsures ont une incidence annuelle estim�e � pr�s de 15 000-20 000 et entra�nent environ 50 d�c�s par an.

Les morsures dues aux vip�res du genre Vipera sont les plus fr�quentes: V. berus essentiellement, suivie dans l'ordre d�croissant, de V.aspis et des autres esp�ces (V. ammodytes, V. latastei, V. lebetina et xanthina, V. ursinii et V. seoanei). Toutes ces esp�ces sont �troitement apparent�es. Si elles diff�rent parfois par leur taille et leur aspect et se rencontrent dans des r�gions g�ographiques diff�rentes, les constituants de leur venin sont tr�s proches.

La plupart des morsures se produisent entre mai et octobre et touchent essentiellement les hommes, aux membres sup�rieurs en particulier. Le venin, inject� dans une zone intra-cutan�e ou souscutan�e (tr�s rarement intramusculaire ou intraveineuse) peut provoquer une douleur, un �d�me et un �ryth�me locaux, et une ecchymose plus ou moins grave, r�sultant de la l�sion des tissus et de l'endoth�lium des capillaires locaux. Les signes et sympt�mes d'envenimation apparaissent en quelques minutes mais les effets g�n�raux sont parfois retard�s de plusieurs heures. La pr�sence d'ad�nopathies et d'une lymphangite est la preuve du passage du venin dans le syst�me lymphatique. L'anxi�t� est intense et des signes et sympt�mes gastro-intestinaux apparaissent (vomissements, douleurs abdominales, diarrh�es), de m�me qu'hypotension, p�leur, soif et tachycardie. Des complications respiratoires, r�nales et h�matologiques (coagulopathie) sont possibles, comme des troubles neurologiques (ptosis, paralysie oculomotrice et dysphagie). La mort est tr�s rare, et cons�cutive � un collapsus cardiovasculaire, un �d�me pulmonaire, une asphyxie, une infection secondaire et une h�morragie.

En g�n�ral, le diagnostic de morsure est facile: la trace des crochets � venin est habituellement visible et la douleur locale importante. Certaines morsures sont dites "s�ches" et l'incident n'est pas suivi d'envenimation. Inversement, des serpents d�pourvus de crochets peuvent dans de rares cas �tre � l'origine d'une envenimation par contact avec la salive venimeuse. L'esp�ce n'est clairement identifi�e que tr�s rarement, car le serpent est rarement captur�. Les probl�mes cliniques principaux sont:
- 1) d'�valuer la gravit� de l'envenimation;
- 2) de d�cider la mise en �uvre d'un traitement sp�cifique, essentiellement l'utilisation ou non d'un anti-venin.

L'extension de l'�d�me, qui appara�t dans les 2 premi�res heures, est li�e � la gravit� de l'envenimation, de m�me que la pr�sence de troubles gastro-intestinaux et cardio-vasculaires. Un titrage au moyen d'un immuno-adsorbant li� � une enzyme (ELISA) mis au point en 1990 permet de quantifier la dose de venin de V. berus et V. aspis pr�sent dans le sang et l'urine. L'�valuation clinique de la gravit� et ce test ELISA se sont montr�s utiles pour �valuer l'importance de l'intoxication et prendre la d�cision concernant l'administration de l'anti-venin.

Les anti-venins bruts d'origine �quine existent depuis 1920 et des pr�parations purifi�es comme le F(ab)2 sont disponibles depuis les ann�es 70. Cependant, ils ont toujours �t� utilis�s avec r�ticence, en raison de la faible mortalit� li�e aux morsures de serpent et du risque de r�action d'hypersensibilit� (choc anaphylactique, �d�me de Quincke, �d�me laryng�, hypotension, maladie du s�rum). Un anti-venin �quin constitu� du fragment F(ab)2 purifi� et pasteuris�, et des fragments F(ab) ovins ont �t� r�cemment mis au point; ce dernier anti-venin s'est r�v�l� plus s�r et pr�s de 10 fois plus efficace que la pr�paration �quine. Une �tude multicentrique portant sur 30 patients a montr� une r�solution rapide des signes et des sympt�mes g�n�raux aigus et une importante diminution de l'incidence de l'�d�me extensif (en raison probablement de la cin�tique du fragment F(ab). Aucune r�action allergique n'a �t� observ�e, les immunoglobulines d'origine ovine �tant moins immunog�nes que celles d'origine �quine. La concentration plasmatique du venin atteint un pic entre 30 minutes et 4 heures apr�s la morsure (demi vie 8 heures), et il est donc important d'administrer les anticorps au plus t�t. Une seconde dose est parfois n�cessaire en raison de la recirculation du venin ou de ses constituants.

Le traitement symptomatique est indiqu� pour corriger l'hypovol�mie et lutter contre le choc (r�tablissement de la vol�mie et administration d'inotropes), les r�actions allergiques ou analphylactiques (administration d'�pin�phrine et de cortico�des), l'�d�me pulmonaire, l'insuffisance r�nale et les troubles h�matologiques/de la coagulation. Les sympt�mes locaux n�cessitent l'immobilisation et l'�l�vation du membre, un bandage l�g�rement compressif, et l'administration d'analg�siques et d'antibiotiques. L'apon�vrectomie peut �tre n�cessaire en cas de syndrome compartimental.

Concernant les premiers secours sur le terrain, il faut souligner les mesures r�actualis�es: ce qu'il faut faire et ne pas faire. Beaucoup de recommandations qui pr�valaient autrefois, comme poser un garrot, inciser la plaie et sucer le venin, entra�nent des l�sions et des s�quelles graves, notamment si la morsure provoque des l�sions tissulaires locales importantes. Les appareils d'aspiration � pression n�gative ("extracteurs") peuvent att�nuer l'effet de l'envenimation et diminuer la dose d'antivenin n�cessaire, mais leur efficacit� reste � prouver. L'aspiration doit �tre effectu�e dans les minutes qui suivent la morsure pour avoir une utilit�. L'utilisation de chocs �lectriques sous haute tension est une vieille recommandation qui remonte � 1899, remise au go�t du jour en 1986 ("stun guns") par certains physiciens s'appuyant sur des observations non document�es. Elle a �t� interdite aux Etats-Unis d'Am�rique par la Federal Drug Administration. Le traitement des morsures de serpent par choc �lectrique sous haute tension est � la fois inefficace et potentiellement dangereux.

Pour r�sumer, mis � part le traitement symptomatique et palliatif appropri�, l'essentiel du traitement dans les cas mod�r�s � s�v�res consiste � administrer au plus t�t l'anti-venin sp�cifique. La recherche pr�coce dans le sang de l'antig�ne venimeux peut �tre utile mais n'est pas facilement disponible. Ce qu'il faut maintenant, c'est fabriquer un fragment F(ab) polyclonal de mani�re rentable.

Serpents exotiques. Les collectionneurs et les �leveurs d'esp�ces exotiques sont une population � risque et la prise en charge des envenimations est chez eux difficile. Deux raisons � cela, tout d'abord les cliniciens sont sans exp�rience du diagnostic et du traitement de ces morsures et ensuite, l'envenimation est parfois grave, les esp�ces �tant dangereuses et/ou les anti-venins sp�cifiques n'existant pas. Des morsures l�tales de Echis ont �t� signal�es en France. Des morsures dues � des �lapid�s (Naja), des crotalid�s (Bothrops, Crotalus, Calloselasma) et des viperid�s (Cerastes, Bitis) ont �galement �t� signal�es. En Suisse, pr�s de 50% des envenimations dues � des esp�ces non autochtones sont imputables � des morsures de serpent, et pr�s de 10% des cas sont graves. Les morsures de cobra entra�nent des syndromes neurologiques tandis que des troubles de la coagulation et des l�sions locales font suite aux morsures de Crotalidae et de diverses vip�res. Il est par cons�quent souhaitable � mais pas toujours possible � de disposer d'un stock complet d'anti-venins sp�cifiques. En g�n�ral, les collectionneurs de serpent et les herp�tologistes connaissent les esp�ces qu'ils �l�vent et poss�dent parfois l'anti-venin sp�cifique. La d�cision du m�decin d'utiliser ou non les anti-venins peut toutefois poser des probl�mes m�dico-l�gaux.

   Arachnid�s:

Scorpions. Toutes les esp�ces de scorpions (1.500 environ) ont des glandes � venin, mais 25 esp�ces seulement sont connues comme dangereuses et posent dans certaines parties du monde un probl�me de sant� publique tr�s important. Les piq�res de scorpion sont assez fr�quentes dans le sud de la France et dans les pays m�diterran�ens. Elles sont dues essentiellement aux "scorpions noirs", Euscorpius flavicaudis, E. italicus, E. carpathicus, Belisarius xambeni et au "scorpion jaune" Buthus occitanus. Ils ne sont g�n�ralement pas dangereux et ne provoquent qu'une r�action locale. La piq�re de Buthus peut toutefois entra�ner une douleur, un �d�me et un �ryth�me locaux ainsi que des sympt�mes gastro-intestinaux. Euscorpius carpathicus peut aussi �tre dangereux, en particulier chez l'enfant. C'est un scorpion indig�ne du sud de la France, de l'Espagne et de certaines parties de l'Italie mais on peut le trouver dans d'autres r�gions o� il a pu �tre transport�, le Royaume-Uni par exemple. En r�gle g�n�rale, aucun traitement n'est n�cessaire apr�s piq�re par des scorpions end�miques courants. Cependant, des esp�ces tropicales et subtropicales dangereuses peuvent �tre ramen�es par des collectionneurs, apport�es avec des bagages ou des fruits import�s. En cas de piq�re de scorpion pr�sum�e, les victimes seront gard�es en observation attentive pendant au moins 12 heures. On recherchera des sympt�mes et des signes d'instabilit� du syst�me nerveux autonome, hypertension, arythmie cardiaque et/ou difficult�s respiratoires par exemple. Les douleurs musculaires g�n�ralis�es peuvent �tre trait�es par des injections intraveineuses de gluconate de calcium. Les benzodiaz�pines et les autres d�presseurs. du syst�me nerveux central sont contre-indiqu�s. L'administration de vasodilatateurs, de bloquants des canaux calciques, de b�tabloquants et d'anti-arythmiques peut �tre n�cessaire ainsi que l'injection de l'anti venin sp�cifique. Le seul traitement efficace contre la douleur est l'infiltration d'anesth�siques locaux dans la r�gion de la piq�re.

Araign�es. Les araign�es sont ubiquitaires et leurs morsures sont fr�quentes, m�me en milieu urbain. Cependant, quelques cas seulement font l'objet d'un signalement et le plus souvent l'araign�e n'est pas identifi�e. L'esp�ce la plus dangereuse est Latrodectus mactans, sous-esp�ce tredecimguttatus ("veuve noire" ou "malmignathe"), pr�sente dans les pays m�diterran�ens, en particulier en Espagne, en Italie et dans les Balkans. L'habitat est g�n�ralement situ� � l'ext�rieur, dans les granges, les �tables et les tas de bois. Seule la femelle est dangereuse pour l'�tre humain. Elle peut �tre facilement identifi�e et porte deux taches rouges typiques � la face dorsale de l'abdomen.

La morsure provoque une douleur intense qui peut s'�tendre � tout le membre. Les ganglions lymphatiques loco-r�gionaux sont souvent sensibles et hypertrophi�s. Des douleurs musculaires s�v�res, en particulier des muscles pelviens, abdominaux et thoraciques sont le signe d'une envenimation g�n�ralis�e. On observe seulement une r�action mineure locale (avec parfois une petite zone de n�crose). Le patient souffre d'hypertension, de tachycardie, de naus�es, de vomissements, de c�phal�es, de sudation et parfois de convulsions. Les analyses de laboratoire montrent une hyperleucocytose, une hyperalbuminurie et une �l�vation de la cr�atine phosphokinase (CPK). Les signes et les sympt�mes �voluent environ sur 24 heures puis se r�solvent graduellement les jours suivants, m�me en l'absence de traitement. Celui-ci s'appuie sur l'utilisation du gluconate de calcium par voie intraveineuse pour lutter rapidement contre la douleur, et, s'il est disponible, sur l'antivenin sp�cifique (qui peut �tre administr� 1-2 jours apr�s la morsure). Il faut �viter les d�presseurs du syst�me nerveux central. Les opio�des et les anti-inflammatoires non st�ro�diens sont inefficaces contre la douleur. L'efficacit� des sels de calcium est controvers�e car ils ne semblent pas efficaces dans le traitement de la douleur. L'application d'une vessie de glace diminue la douleur chez certains patients.

L'antivenin sp�cifique de Latrodectus n'est utilis� que dans les envenimations graves, chez les patients � haut risque (enfants et personnes �g�es par exemple) ou chez ceux qui pr�sentent des sympt�mes persistants plusieurs jours apr�s la morsure. Il est administr� par voie intraveineuse, apr�s pr�m�dication par les antihistaminiques (s'assurer que l'on dispose d'adr�naline et des moyens de r�animation). Il n'est en g�n�ral pas n�cessaire d'utiliser plus d'une ou 2 ampoules, 3 au maximum. L'anti-venin anti-Latrodectus est le seul mode de traitement qui �limine la douleur.

Loxosceles spp. ("recluse") est une araign�e assez petite et d�licate que l'on trouve dans les habitations, g�n�ralement derri�re les meubles ou les peintures, ou sous les lattes de plancher. La morsure entra�ne des l�sions tissulaires locales et des sympt�mes b�nins, fi�vre, frissons, malaise et vomissements par exemple, qui se r�solvent habituellement quelques jours apr�s la morsure, une l�sion n�crotique pouvant cependant persister et s'ulc�rer. Le loxoscelisme g�n�ralis�, l'h�molyse, le dysfonctionnement r�nal et la coagulopathie sont tr�s rares en Europe. Le traitement est purement symptomatique, l'anti-venin ayant une efficacit� douteuse. La chirurgie reconstructrice des zones n�cros�es n'est pas tr�s efficace.
L'oxyg�ne hyperbare semble apporter un soulagement dans les cas graves. En cas d'aran�isme n�crotique pr�sum�, l'infection sera pr�venue et trait�e vigoureusement.

Lycosa spp. ("tarentule" ou lycose ou "araign�e-loup") est une araign�e relativement grosse, gris�tre, ubiquitaire en Europe m�ridionale. Elle mord rarement, mais en cas de morsure on observe une douleur et un �d�me locaux et l'infection est possible.

Phoneutria nigriventer ("araign�e du bananier") est une esp�ce exotique, originaire du Br�sil (il y a des esp�ces comparables en Colombie et au Costa Rica), qui parvient dans les pays europ�ens avec les conteneurs de fruits. L'envenimation peut �tre tr�s grave sous les tropiques, mais est b�nigne sous les climats plus froids.

Tiques. Ixodes spp. devient un parasite humain relativement fr�quent, vecteur de maladies infectieuses (maladie de Lyme) et porteur de toxines. Les tiques peuvent provoquer des troubles neurologiques se manifestant par une paralysie flasque ascendante. La toxicit� g�n�ralis�e est rare en Europe, mais il ne faut pas m�conna�tre cette �ventualit�, surtout chez les touristes de retour d'Australie et d'Am�rique du Nord. Les sympt�mes sont une irritation locale, avec fi�vre et malaise, suivie d'une ataxie qui peut dans les cas graves �voluer vers la paralysie respiratoire. Un strabisme, un nystagmus et une dysphagie sont possibles. Normalement, la symptomatologie dispara�t quand la tique a �t� retir�e si le diagnostic est fait dans les 1-2 premiers jours, mais il arrive qu'elle s'aggrave. La tique doit �tre enlev�e avec beaucoup de soin pour �viter de laisser en place l'appareil buccal enfonc� dans la peau: soulever la peau � l'aide d'une pince fine, en �vitant d'�craser la tique, que l'on enl�ve en appliquant de l'alcool ou l'extr�mit� d'une cigarette. Un anti-venin pour lutter contre la paralysie due aux tiques est disponible en Australie.

  Insectes:

Hym�nopt�res. Les piq�res d'Apidae spp. (abeille) et de Vespidae spp. (gu�pes, frelons) sont tr�s fr�quentes et repr�sentent un risque au cours des activit�s ext�rieures r�cr�atives ou professionnelles dans le monde entier. Il faut distinguer nettement les piq�res simples, les piq�res multiples et l'allergie aux piq�res. Les piq�res provoquent une douleur aigu�, p�n�trante ou � type de br�lure. Il se forme une boule d'�d�me et �ryth�me, avec un �ryth�me central entour� d'une aur�ole blanche, puis un �d�me. Le prurit peut �tre important. Les IgE n'interviennent pas dans ces r�actions, qui sont dues aux constituants toxiques et inflammatoires du venin et qui se r�solvent habituellement en quelques heures. Une r�ponse excessive peut appara�tre, entra�nant un �d�me extensif, qui peut toucher la totalit� du membre (plus fr�quemment chez les personnes �g�es). Un pic peut �tre atteint en 1 � 3 jours et la r�solution peut prendre une semaine ou plus. Les piq�res � la gorge peuvent entra�ner un �d�me pharyng� et une obstruction des voies respiratoires mortels. Les piq�res multiples peuvent provoquer un syndrome toxique mortel en raison de l'effet cumul� des toxines. La morbidit� et la mortalit� associ�es � plus de 30 piq�res de gu�pes ou 200-300€piq�res d'abeilles (moins chez l'enfant) sont importantes.

Le tableau clinique est le suivant: h�molyse intravasculaire, rhabdomyolyse (avec myoglobin�mie et myoglobinurie), dysfonctionnement h�patique, d�tresse respiratoire avec syndrome de d�tresse respiratoire aigu� (SDRA), hypertension, isch�mie myocardique, choc, insuffisance r�nale aigu�, h�morragie et coma. Les r�actions allergiques aux piq�res d'hym�nopt�re sont caract�ris�es de la fa�on suivante: locales imm�diates (avec �d�me local), g�n�ralis�es b�nignes imm�diates (avec �d�me diffus ou urticaire), g�n�ralis�es graves imm�diates (choc anaphylactique), retard�es (maladie du s�rum et r�actions atopiques). Les r�actions allergiques ne d�pendent pas de la dose de toxine re�ue et une seule piq�re peut �tre fatale.

Contrairement aux piq�res d'hym�nopt�re, les piq�res des autres insectes provoquent rarement des r�actions allergiques graves. Un terrain allergique pr�existant, asthme ou allergie alimentaire, ne pr�dispose toutefois pas n�cessairement aux allergies aux piq�res d'abeille. L'enfant et la personne �g�e sont plus sensibles aux piq�res, de m�me que les personnes ayant une cardiopathie coronarienne.

Le traitement des piq�res d'hym�nopt�re doit �tre rapide: enlever imm�diatement le ou les dard(s) (si c'est une abeille), et donner des anesth�siques locaux et des antihistaminiques. L'autonomie du dard de l'abeille (auto-amputation) permet l'instillation d'une grande quantit� de venin, le m�canisme d'instillation du venin se poursuivant malgr� la mort de l'abeille (ce n'est pas le cas avec les vespides qui piquent plusieurs fois sans laisser leur dard). Les m�thodes employ�es pour neutraliser le venin (chaleur) et extraire le dard (grattage ou retrait avec des pinces) sont contest�es. Les instructions sont les suivantes:

- S'�carter de l'endroit o� a eu lieu la piq�re. Les ph�romones d'alarme attirent souvent les autres abeilles.

- Examiner la piq�re pour voir si le dard est rest� et l'enlever imm�diatement pour �viter une envenimation ult�rieure par la glande � venin qui reste accroch�e. Gratter pour l'�liminer, avec la lame d'un couteau, une carte en plastique ou les ongles (�viter les pinces). Nettoyer la piq�re � l'eau et au savon.

- V�rifier que les voies respiratoires sont libres et que la personne respire et �valuer l'�tat cardio-vasculaire. Si n�cessaire, mettre en place une aide ventilatoire ou circulatoire et poser un acc�s veineux. En cas de choc anaphylactique, �vacuer le patient pour la prise en charge de l'anaphylaxie.

- En cas de sympt�mes g�n�raux, le patient doit �tre hospitalis� et attentivement surveill�.

- L'application locale de glace peut r�duire l'�d�me. Les a�rosols contenant du sulfate d'aluminium peuvent �tre utilis�s. Si l'�d�me est extensif et g�nant, les cortico�des par voie g�n�rale peuvent �tre utiles. L'application locale de pommade � 0,5% d'hydrocortisone apporte parfois une am�lioration des sympt�mes. On pourra administrer des analg�siques.

- La prophylaxie anti-t�tanique est parfois n�cessaire.

- La prise en charge des piq�res multiples est la suivante: enlever d'urgence le plus grand nombre possible de dards implant�s dans la peau, entretenir les fonctions vitales et hospitaliser; il faut s'attendre alors � l'apparition d'une h�molyse intravasculaire, d'une rhabdomyolyse, d'une n�crose tubulaire aigu�, et d'une insuffisance cardio-vasculaire et respiratoire. La pr�vention ou l'am�lioration de la n�phropathie reposent sur une hydratation suffisante avec perfusion intraveineuse et utilisation pr�coce de bicarbonate et de mannitol. La rhabdomyolyse peut entra�ner une �l�vation rapide du potassium s�rique, lequel sera contr�l� r�guli�rement. Pour contrer les effets de l'hyperstimulation du syst�me sympathique due aux piq�res multiples, la nif�dipine et la prazosine sont parfois utiles. Il est recommand� d'employer empiriquement � forte dose un antihistaminique ou un cortico�de pour lutter contre les divers effets inflammatoires du venin, notamment la lib�ration massive d'histamine..

- Les piq�res dans la gorge exigent parfois une intubation endotrach�ale d'urgence, voire une trach�otomie.

- Quand les patients ont d�j� eu des r�actions allergiques importantes � la suite de piq�res d'hym�nopt�re, ils seront incit�s � prendre � l'avenir plus de pr�cautions (�tre muni en permanence de seringues pr�remplies d'�pin�phrine et porter un signe identifiant le risque (par exemple bracelet ou carte, de type
Medic Alert) et � envisager une d�sensibilisation. L'hypersensibilisation peut �tre confirm�e par la mise en �vidence d'IgE s�riques sp�cifiques du venin, soit par RAST (radio-allergosorption), soit par test cutan�.

   Myriapodes

Les seuls myriapodes venimeux sont les mille-pattes, Scolopendra cingulata par exemple. Leur mors�re provoque une douleur et des r�actions inflammatoires s�v�res. Le traitement est uniquement symptomatique.


Animaux aquatiques:

Les morsures, piq�res et d�chirures dues aux animaux aquatiques sont un risque des activit�s r�cr�atives qui touche les nageurs, les plongeurs et les p�cheurs, et un risque professionnel dans l'industrie de la p�che. L'envenimation peut �galement avoir lieu au cours de la pr�paration des aliments, les toxines �tant encore actives 24 heures apr�s la mort du poisson. L'envenimation est en g�n�ral provoqu�e par l'action m�canique de la pression exerc�e sur une glande � venin apr�s perforation de son enveloppe et p�n�tration du dard, et non par injection active du venin (comme chez les animaux qui poss�dent un appareil venimeux sophistiqu�). Dans de nombreux cas, la distinction entre piq�re ou morsure venimeuse et non venimeuse est difficile, car les s�cr�tions normales des glandes cutan�es p�n�trent dans la blessure et provoquent diverses r�actions inflammatoires, et des fragments d'�pine restent dans la blessure.

L'appareil venimeux se compose d'une �pine osseuse, recouverte d'une enveloppe t�gumentaire, pourvue ou non de sillons. Les cellules/les glandes � venin sont enfonc�es dans les sillons et/ou les tissus qui entourent l'�pine. Au cours de la p�n�tration, la gaine t�gumentaire se retrousse, d�gageant les glandes � poison. Le venin et m�me des fragments de la gaine restent alors dans la blessure. On y trouve aussi parfois des fragments d'�pine. Il en r�sulte donc un effet toxique qui s'associe � la r�action due � l'introduction de mat�riel �tranger. L'appareil venimeux du poisson-pierre est toutefois plus compliqu�. Les glandes � poison ont davantage une forme de sac et sont dispos�es autour de la partie moyenne des �pines. Le venin passe par des canaux � venin sp�cifiques et est inject� � l'extr�mit� des �pines.

   Poissons

Poissons venimeux. Les piq�res dues � des vives (Trachinus spp.) et des rascasses ou scorp�nes (Scorpena spp.) sont relativement fr�quentes sur les c�tes de la M�diterran�e. Elles s'observent habituellement lorsque le baigneur marche sur les �pines dorsales, pelviennes ou anales, ou encore lors de la manipulation li�e � p�che professionnelle. La douleur est imm�diate et intense, irradiant dans la totalit� du membre et provoquant sueurs, naus�es, vomissements et lipothymie. On observe un �d�me local accompagn� de p�leur de la peau au point de piq�re dans le cas des vives, et un saignement dans le cas des rascasses. Le venin est thermolabile et l'exposition de la blessure � la chaleur (plonger la partie atteinte dans l'eau chaude) diminue la douleur. Cette mesure est plus efficace que les analg�siques courants, mais des injections locales d'adr�naline � 1% peuvent �tre n�cessaires pour att�nuer la douleur et limiter la diffusion du venin. La blessure sera nettoy�e soigneusement en �liminant tous les restes d'�pines et les traces de vase, l'infection �tant fr�quente et difficile � traiter. L'�volution de la l�sion ne pose en g�n�ral pas de probl�me. Toutefois, la blessure peut avoir tendance � saigner facilement. L'infection est fr�quente, entra�nant une cellulite et une n�crose tissulaire. L'infection secondaire n'est pas rare. Les s�quelles sont exceptionnelles. Un anti-venin dirig� contre Trachinus a �t� mis au point en R�publique f�d�rale de Yougoslavie et semble �tre efficace.

Dasyatis spp. (pastenague), Myliobatis spp. (aigle de mer) et divers autres rajiformes (raies arm�es) sont les poissons venimeux les plus fr�quemment rencontr�s dans le monde. Leur venin est instable, thermolabile, et est inject� profond�ment au moyen d'un dard effil� et crant� (jusqu'� 5 cm) enfonc� par la puissante musculature de la queue. En raison de la longueur de l'aiguillon, il y a un risque de blessure abdominale et thoracique accompagn�e de traumatisme des organes, notamment chez l'enfant, ainsi que de l�sions musculaires et articulaires parmi les populations expos�es professionnellement. La douleur est imm�diate, suivie d'un �d�me et d'un saignement, et dans certains cas, de troubles cardio-vasculaires et neurologiques. Le traitement comporte l'irrigation de la blessure, l'�limination de la gaine venimeuse qui est rest�e dans la plaie et la lutte contre la douleur au moyen de lidoca�ne � 1% (sans �pin�phrine). L'immersion dans l'eau chaude est recommand�e mais moins efficace quand les l�sions sont profondes. L'administration d'antibiotiques et la vaccination antit�tanique sont importantes.

Les synanc�es ou poissons pierre (Synanceja trachynis) et les pt�rois ou poissons dragons, poissons de feu, poissons z�bres ou rascasses volantes (genre Pterois) repr�sentent un risque pour les aquariophiles amateurs de poissons tropicaux. Le venin de la synanc�e active des r�actions cholinergiques et adr�nergiques intenses, provoque une douleur violente suivie d'un gonflement, de frissons, de naus�es, de vomissements, de sueurs, de douleurs thoraciques et d'arythmie cardiaque. L'ulc�ration et la n�crose sont des complications possibles. L'envenimation est moins grave avec les poissons en captivit� car ils perdent leur activit� toxique. Le traitement consiste pour l'essentiel � soulager la douleur, neutraliser le venin par la chaleur, administrer l'anti-venin �quin sp�cifique de la synanc�e (pas facile � se procurer) et � pr�venir l'infection.

   Coelent�r�s

Cnidaires. Les m�duses, les an�mones de mer, le mill�pore ou corail de feu et les hydro�des appartiennent � ce phylum, caract�ris� par la pr�sence de minuscules capsules ou cellules urticantes (les cnidae ou n�matocystes ou spirocystes) qui contiennent un tubule repli� qui se d�vagine pour injecter le venin. La d�charge des n�matocystes est d�clench�e par le contact avec la peau et le tube venimeux p�n�tre dans la partie sup�rieure de l'�piderme provoquant une douleur ou une sensation de br�lure imm�diates. Dans le cas des m�duses, les l�sions ont un aspect lin�aire (comparable � celles du zona ou � des traces de flagellation � l'endroit o� les tentacules ont touch� la peau). On peut observer des phlyct�nes et parfois des l�sions pigmentaires et persistantes. L'�ruption appel�e "�ruption du baigneur" est imput�e aux larves de cnidaires.

Seules les cnidaires des r�gions tropicales et subtropicales, comme Chironex fleckerii (cubom�duse) ou Physalia physalis (ou physalie, gal�re portugaise) qui lui est �troitement apparent�e, pr�sentent un risque l�tal apr�s envenimation et aussi un risque de noyade cons�cutif � la s�v�rit� de la douleur et � la syncope, mais ne s'observent que rarement sur les c�tes europ�ennes. Le traitement des l�sions courantes dues aux cnidaires est essentiellement le m�me: laver abondamment � l'eau de mer, retirer soigneusement les n�matocystes (en rasant ou en grattant la zone expos�e au moyen d'une lame de couteau aff�t�e, d'un rasoir ou d'une carte en plastique, en �vitant de frotter), appliquer localement de l'acide ac�tique (5%) ou une p�te faite de bicarbonate de soude, donner des cortico�des locaux et garder le sujet en observation. L'anti-venin sp�cifique n'existe que pour Chironex fleckerii.

   Mollusques

Pieuvres. Deux esp�ces seulement de pieuvres m�diterran�ennes, Octopus. vulgaris et O. macropus, sont venimeuses et risquent de provoquer des signes et des sympt�mes neurologiques, chez les plongeurs en g�n�ral. Le traitement est symptomatique.

   Echinodermes

Oursins. Ils sont couverts de piquants longs, cassants et pointus associ�s � des glandes contenant du venin qui provoque une l�sion p�n�trante, tr�s fr�quemment infect�e. Lorsque des fragments de piquants restent fich�s dans la peau, un granulome indolore de type sarco�de peut se former, avec un risque d'ost�olyse. Le traitement est symptomatique et pr�ventif.

Dans le cas des envenimations par les animaux aquatiques, le traitement diff�re suivant qu'il y a une blessure, une piq�re ou une r�action cutan�e locale (rougeur locale). Les piq�res dues aux poissons venimeux doivent �tre immerg�es dans l'eau chaude, le dard extrait (contr�le radiographique si n�cessaire), la blessure nettoy�e soigneusement et un traitement antibiotique mis en place (ajouter l'anti-venin dans le cas de la synanc�e). Si les l�sions sont dues � des pieuvres ou des oursins, le traitement est fondamentalement le m�me, sans exposition � la chaleur. Dans le cas des �ruptions ou des l�sions lin�aires, il faut envisager un contact avec des cnidaires et le traitement repose sur l'acide ac�tique � 5%, la d�contamination locale et les cortico�des (anti-venin dans le cas de Chironex fleckerii), accompagn� du suivi appropri� � la recherche de s�quelles �ventuelles.

Relev� �pid�miologique hebdomadaire du 21 septembre 2001, 76�me ann�e
N� 38, 2001, 76, 289-300

http://www.who.int/wer

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